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Bourse : Pourquoi les marchés ont-ils besoin de souffler

Après une année 2022 très difficile, du fait d’un durcissement sévère des politiques monétaires, les marchés enregistrent un fort rebond depuis janvier. Les marchés ont-ils besoin de souffler ? Réponses de Mary-Sol Michel, Directrice de la Gestion sous mandat chez Swiss Life Banque Privée.

Quelle dynamique ont connu les marchés financiers ces dernières semaines ? 
 

Mary-Sol Michel : En avril, les indices européens ont continué de surperformer : le CAC 40 a par exemple progressé de 2,3%, quand le S&P américain ne gagnait que 1,5% et le CSI 300 chinois se contractait de 0,5%. L’indice français a été tiré par la très bonne performance des valeurs de luxe qui le composent – LVMH, Kering, Hermès et L’Oréal – et qui pèsent désormais plus d’un quart de sa capitalisation ! Sur les marchés obligataires, les indices souverains sont restés à l’équilibre sur le mois, tandis que la dette des entreprises, notamment son segment le plus risqué, a poursuivi sa progression. 
 

Plus largement, comment analysez-vous le mouvement des marchés depuis le début d’année ? 
 

Mary-Sol Michel : Après une année 2022 très difficile, du fait d’un durcissement sévère des politiques monétaires, les marchés enregistrent un fort rebond depuis janvier. Ce rattrapage s’explique par plusieurs facteurs. Tout d’abord, l’environnement macroéconomique résiste mieux qu’attendu, tant aux Etats-Unis qu’en Europe : pour 2023, on ne parle plus d’une récession mais d’une croissance faible, grâce à une bonne tenue de la consommation des ménages, à l’orientation positive des activités de services (loisirs, tourisme notamment) et à un marché du travail dynamique. Ensuite, l’inflation reflue sous les 5% pour les Etats-Unis et les 7% pour l’Europe, ce qui laisse penser que les banques centrales ont fait l’essentiel du chemin en matière de resserrement monétaire : la hausse des taux de la Fed américaine début mai était probablement la dernière. Quant à la BCE, elle doit encore faire face à une inflation sous-jacente (hors alimentaire et énergie) trop élevée. Elle poursuit donc ses hausses de taux mais celles-ci devraient se limiter à un ou deux resserrements supplémentaires. Enfin, sur le plan microéconomique, on a assisté à des publications de résultats de bonne qualité des deux côtés de l’Atlantique.

 

Quelle est votre vision des marchés pour les prochaines semaines ? 
 

Mary-Sol Michel : Ces bonnes nouvelles nous semblent désormais intégrées dans les prix de marché et les Bourses vont avoir besoin de souffler. On peut ainsi souligner plusieurs signes de fragilité. Les bons résultats du premier trimestre n’ont pas été significativement salués par les marchés. En revanche, les publications inférieures aux attentes ont été souvent lourdement sanctionnées : c’est le signe d’un certain essoufflement de la dynamique de marché. De plus, le stress bancaire, bien qu’atténué, continue de peser sur les conditions de crédit, en particulier aux Etats-Unis où les débats sur le plafond de la dette risquent de conduire à une réduction du soutien budgétaire. Un ralentissement de la croissance est donc à anticiper, comme le reflètent d’ailleurs les cours du baril du pétrole, qui refluent. Enfin, nous pensons que les investisseurs sont toujours trop optimistes quant au calendrier de baisses des taux : attendues dès le troisième trimestre aux Etats-Unis et fin 2023 en Europe, ce mouvement n’interviendra probablement pas avant début 2024. Nous ne sommes donc pas inquiets à moyen terme mais nous restons prudents à court terme. 
 

Comment avez-vous fait évoluer les portefeuilles en avril ? 
 

Mary-Sol Michel : Compte tenu de cette pause que nous attendons sur les marchés, nous avons allégé les positions qui avaient le plus fortement progressé depuis le début de l’année. Cette prise de profits nous a par exemple amenés à réduire, dans les portefeuilles exposés à l’international, le poids de Microsoft : le titre a gagné 30% depuis janvier, porté par sa participation dans Open AI et son outil d’intelligence artificielle ChatGPT et par la publication de bons résultats. Du côté des valeurs européennes, nous avons allégé Sanofi et vendu Airbus, qui, malgré un carnet de commandes rempli, risque de pâtir de difficultés persistantes sur sa chaîne d’approvisionnement. Nous avons également fait entrer le leader mondial des services à l’énergie SLB (anciennement Schlulmberger). Après une décennie de sous-investissements dans le secteur pétrolier, la société devraient en effet profiter du rattrapage de la demande des énergéticiens au sens large, y compris en matière d’énergies renouvelables. Elle est ainsi très bien positionnée sur le segment de l’hydrogène. 
 

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